Louer sa voiture à un inconnu le temps d’un week-end plutôt que de la laisser dormir au garage, faire un trajet Lyon-Nice aux côté d’un parfait étranger, échanger son appartement parisien contre un loft New-Yorkais pendant les vacances, jouer les banquiers en finançant des projets artistiques….
Il y a 5 ans, tout cela paraissait pour le moins incongru.
Le web : de la méfiance vers une création de confiance
La base de ces comportements nouveaux, c’est la confiance. Et cette confiance, c’est en bonne partie internet qui l’a restaurée. Pourtant, les débuts étaient laborieux. Il y a à peine quelques années, acheter un CD sur internet n’était pas un acte anodin. Piratage de compte bancaire et usurpation d’identité étaient les pires fléaux envisagés, la peur d’un « lâché prise technologique » freinant même les plus téméraires.
Mais nous sommes dans un monde qui change ! La sécurisation des moyens de paiement ou encore la possibilité de souscrire à une assurance ont été les étapes nécessaires pour favoriser les transactions en ligne. Mais très vite, le 2.0, ou la possibilité pour les internautes d’interagir entre eux, a impacté positivement la vente en ligne. Le succès des marketplaces comme Amazon en est un bel exemple: avis, vendeurs notés, produits plébiscités ou décriés par les utilisateurs eux-mêmes, firent d’internet un lieu de transparence, une vertu que l’on trouve plus difficilement dans le monde « réel ».
Bouleversant les habitudes de consommations, les fonctions sociales du web donnent naissance à une économie du partage dont les signes sont de plus en plus tangibles.
La confiance, stimulée par le communautaire
Si sécurité, crédibilité ou honnêteté, sont les premiers adjectifs qui viennent à l’esprit de celui qui cherche à définir la confiance, avec les sites collaboratifs, une autre notion est en train de devenir évidente : celle de communauté qui a permis à des comportements nouveaux d’émerger.
Prenons le covoiturage : qui me dit que cette personne qui affiche un sourire bonhomme sur mon site de covoiturage conduit « en bon père de famille », est digne de confiance et n’a pas un passif plus ou moins louche?
A vrai dire, rien… Mais, j’ai un apriori positif : comme moi, il fait partie des consommateurs malins qui dépensent et polluent moins que les autres.
Mais pas seulement. Sur le site covoiturage.fr, je suis vite rassurée par la mention « 100% de covoitureurs satisfaits par ce conducteurs « expert » ». En plus, tous les avis déposés sont élogieux vis-à-vis de ce covoitureur à la fois discret et sympathique.
La quantité plus importante que la qualité ?
Comme évoqué plus haut, les avis des utilisateurs eux-mêmes sont tout ce qu’il y a de plus rassurants, mais là-aussi je doute : et les faux avis, ça n’existe pas ? Si, bien sûr. Il y a quelques mois, une célèbre marque de Soda a fait parler d’elle pour avoir fait appel à des milliers de « faux fans » sur facebook. C’est peu éthique, mais sauf quand la supercherie est révélée comme ici, ça marche. Une étude récente du MIT (MIT Media Laboratory’s Human Dynamics) a en effet cherché à montrer que le nombre de recommandations/commentaires primait sur la qualité pour favoriser la popularité d’un produit ou la décision d’un achat. Comme lorsque je suis sur Youtube: spontanément, je suis incitée à cliquer sur la vidéo la plus vue et c’est comme cela que certains artistes deviennent populaires sur la toile en un rien de temps.
Bien entendu, les avis les plus fiables sont ceux qui proviennent de mon propre réseau. Par exemple, grâce à facebook, je peux savoir qui est ami avec qui : si je vois que l’ami d’un tel a aimé tel produit ou service, son avis aura plus de valeur à mes yeux que celui d’un parfait inconnu. Il a essayé, il a aimé et même recommandé ce produit : pourquoi pas moi ? Ainsi, lorsque je doute, les réseaux sociaux tout comme les fonctionnalités communautaires jouent pleinement leur rôle de « facilitateurs de confiance ».
« La confiance comme monnaie d’échange ».
Pour conclure, les sites collaboratifs l’ont bien compris, pour acquérir de nouveaux utilisateurs et les fidéliser, il faut bâtir un esprit communautaire. Que l’on profite d’un service ou que l’on s’improvise prestataire de ce service, c’est d’abord ma confiance que je donne à l’autre. C’est cette dernière qui me permet d’accéder à un service moins cher, ou d’avoir un complément de revenu en mettant à disposition mon bien. Parfois, ces échanges sont même totalement gratuits, et la satisfaction réside alors pleinement dans l’échange désintéressé. Ainsi, dans un entretien reporté par le Figaro, Brian Chesky, cofondateur d’Airbnb (un site permettant de mettre son appartement en location à destination d’autres particuliers)) va jusqu’à qualifier la confiance comme la « monnaie d’échange qui fait la valeur de [son] site ».
Et ce n’est qu’un début. L’effet générationnel se fait encore ressentir et peu nombreux sont ceux qui sont d’actifs « consocollaborateurs ». Mais il y a fort à parier que ces nouvelles pratiques vont se propager pour donner naissance à une nouvelle économie, moins « forcée » et surtout plus humaine.